• Sous les jupes des filles

    On passe son temps à essayer de regarder sous les jupes des filles pourquoi ? Enfant, pour voir ce qui s’y passe… ce vide de l’absence passionne et interroge. Adolescent, pour comprendre comment elles fonctionnent… la verge serrée entre les cuisses, mesurant la valeur de ce manque, que l’on n’appréhende pas. Adulte, par lubricité, animé d’un pur voyeurisme obscurantiste… sans doute pour ne pas regarder du bon côté…

     

    —  Véronique ! Véro

    —  Oui.

    —  Sais-tu pourquoi tu as pris tous ses médicaments ?

    —  Je veux mourir !

    —  Mourir ! en voilà une idée Madame cinglée.

    —  Elle en vaut une autre... Au moins celle de la vie.

    —  Pour qui, Madame j’y suis ?

    —  Pour moi.

    —  Non ! pour qui es-tu morte, Madame la Forte ?

    —  Pour cet homme ! je crois.

    —  Oh ! que c’est romantique Madame de pique !

    —  Tu parles, mourir ça fait très mal.

    —  Il est un peu tard pour t’en rendre compte, tu ne crois pas, Madame je sais pas ?

    — Mais je n’ai pas l’impression d’être morte.

    — Tiens et pourquoi donc ? Madame quelconque.

    — J’entends des bruits.

    — Et alors ? Madame...

    — Oh ! assez avec tes Madame ceci, Madame cela, la mort, ça ne fait pas de bruit point.

    — Qu’en sais-tu ? Tête de morue.  

    — Rien, c’est juste une intuition.

    — Crois-tu que la lame qui tranche ou perce ne fasse pas de bruit ?

    — Si bien sûr, tout comme la balle qui fend l’air ou le fracas de la voiture qui entre en collision.

    — Alors tu vois bien… la mort fait du bruit.

    — Mais je te parle de maintenant, j’entends donc je suis.

    — Te voilà philosophe présentement, tête de pioche.

    — T’es bête, mais regarde par toi-même, cette lumière qui filtre au travers de mes paupières.

    — Alors tu t’es loupé ma vieille.

    — On le dirait bien...

    Mes chers auditeurs, bonjour ! On est vendredi et maintenant, il est dix heures, résonne la voix dans l’enceinte du radioréveil.

    Véronique s’éveille brusquement. En sueur, la langue pâteuse, elle reprend conscience avec la réalité. Ce n’était qu’un cauchemar, un simple mauvais rêve, sans doute induit par la dispute d’hier au soir avec son mari. Nauséeuse, elle se lève, le soleil danse déjà au travers des rideaux en velours de sa chambre. Elle enfile son peignoir sur sa grosse chemise de nuit en coton aux nounours délavés, file dans la cuisine en plissant les yeux devant la lumière vive et d’un geste machinal allume la radio. La maison est calme, trop même, Adam est parti depuis longtemps et les enfants sont en vacances chez leurs grands-parents pour deux mois, soudain elle a froid et se sent seule. La radio en sourdine donne les nouvelles du jour pendant qu’elle se sert un thé et grignote une biscotte. Machinalement, elle lit le mot posé sur la table devant elle, signé de son mari, puis file sous la douche.